
Boisson emblématique du Japon, le saké est un alcool obtenu par fermentation d’un riz spécialement sélectionné, à l’aide d’un champignon (kōji) et de levures.
La complexité de son élaboration repose sur une double transformation simultanée : l’amidon du riz est progressivement converti en sucre par le koji, et ces sucres fermentiscibles sont, quant à eux, transformés en alcool par les levures au fur et à mesure qu’il est produit. Ce procédé, unique en son genre, exige précision, hygiène rigoureuse et gestion fine des températures et des temps de fermentation.
Du polissage du grain de riz jusqu’à l’embouteillage, chaque phase joue un rôle déterminant dans l’expression aromatique finale du saké.
Cet article présente, étape par étape, le processus d’élaboration d’un saké dans le respect des méthodes traditionnelles japonaises.
Étape 1 - Le polissage du riz
La fabrication du saké commence par le polissage du riz (seimai), une opération qui consiste à retirer plus ou moins les couches externes du grain - riches en protéines et en lipides, elles sont responsables d'arômes riches et intenses. Leur présence impacte donc grandement le style final du saké. Le cœur du grain de riz renferme l’amidon, élément clé de la fermentation alcoolique. C’est également cette partie centrale qui libère les arômes les plus délicats, souvent doux et fruités.

Le taux de polissage (seimaibuai) est un critère fondamental. Un taux de 70 % signifie que 30 % du grain a été retiré. On parle donc de taux résiduel.
Il existe plusieurs mentions définies par le taux de polissage :
- Junmai : taux résiduel supérieur à 60%
- Ginjō : taux résiduel inférieur à 60%
- Daiginjō : taux résiduel inférieur à 50%
Certaines cuvées très rares et précieuses offrent des taux de polissage allant jusqu’à moins de 10%, ce qui implique que plus de 90% de la matière première d’origine est retirée.
Ce travail est effectué lentement, parfois pendant 40 à 50 heures, pour éviter d’endommager le grain. Le type de riz utilisé pour les sakés premiums est le plus souvent un riz à saké (shuzō kōtekimai), cultivé pour sa richesse en amidon, concentré au coeur du grain, pour optimiser le polissage.
Étape 2 - Le lavage, le trempage et la cuisson du riz
Une fois poli, le riz est lavé pour éliminer la poudre résiduelle du polissage, appelée nuka. Cette étape influence la clarté aromatique du futur saké.
Ensuite, le riz est trempé dans de l’eau pure. Le but est d’atteindre un taux d’humidité optimal à cœur pour assurer une bonne cuisson. Plus le riz est poli, plus cette phase est courte et minutée.

Le riz est ensuite cuit à la vapeur, généralement pendant 40 à 60 minutes. La cuisson doit préserver une texture ferme à l’extérieur et tendre à l’intérieur. Ce compromis est essentiel : trop mou, le riz risque de coller ; trop ferme, il sera mal converti par les enzymes du kōji.
Étape 3 - La fabrication du kōji
Le kōji est l’un des éléments clés du processus. Il s’agit de riz cuit ensemencé avec le champignon Aspergillus oryzae. Ce micro-organisme libère des enzymes, notamment l’amylase, qui vont transformer l’amidon du riz en sucres fermentescibles.

Le kōji est cultivé dans une pièce chaude et humide, appelée kōji muro, pendant environ 48 heures. Durant cette période, les brasseurs :
- aèrent le riz pour éviter une élévation excessive de température ;
- contrôlent manuellement le développement du mycélium ;
- brassent régulièrement le riz pour favoriser une croissance homogène.
La texture duveteuse du champignon est observable en surface, au parfum sucré caractéristique. Le kōji constitue environ 20 à 25 % de la masse de riz utilisée pour le brassage.
Étape 4 - La préparation du pied de cuve (shubo ou moto)
Avant de lancer la fermentation principale, une petite cuve de fermentation est préparée : le shubo, également appelé moto. Il s’agit d’un mélange de riz cuit, de kōji, d’eau et de levures.
Ce pied de cuve a pour fonction de :
- cultiver une population de levures robustes ;
- créer un milieu acide pour limiter le développement de bactéries indésirables.
La fermentation du shubo dure entre 10 et 15 jours si de l’acide lactique est directement ajouté à la cuve (méthode sokujo), mais peut durer jusqu’à un mois en utilisant les techniques anciennes comme le kimoto ou le yamahai, qui font appel aux bactéries lactiques ambiantes pour générer l’acidité naturellement.
Étape 5 - La fermentation principale (moromi)
Le moromi est le moût principal. Il est constitué du shubo, auquel on ajoute progressivement le reste du riz cuit, du kōji et de l’eau. Cette fermentation se fait en trois ajouts successifs (sandan shikomi).

La fermentation se poursuit pendant 18 à 32 jours, à des températures contrôlées (généralement entre 8 °C et 15 °C). Ce processus est appelé fermentation multiple parallèle, car la saccharification et la fermentation alcoolique ont lieu en même temps. Cela permet d’atteindre des taux d’alcool élevés (jusqu’à 20 %), sans distillation.
Étape 6 - Le pressurage
Lorsque le moromi est jugé prêt, il est pressé pour séparer la partie liquide (le saké) des résidus solides (sake kasu).
Trois méthodes principales sont utilisées :
- presse mécanique (yabuta) : méthode industrielle la plus répandue ;
- pressurage traditionnel en caisse (fune) : le moût est versé dans des sacs empilés dans une grande caisse en bois. La pression est ensuite appliquée progressivement par le haut. Cette méthode artisanale, plus lente, permet une extraction douce, souvent prisée pour les sakés haut de gamme ;
- pressurage par sacs suspendus (fukuro-tsuri) : le liquide s’égoutte lentement, sans pression mécanique. Réservé aux cuvées artisanales qui sont parfois appelés shizuku-zake (saké de gouttes).
Les lies solides, riches en protéines, peuvent être utilisés en cuisine, dans l’agriculture ou encore la production de shochu, un alcool distillé traditionnel au Japon.
Étape 7 - La clarification, la pasteurisation et la dilution
Le saké brut (genshu) est ensuite clarifié et stabilisé. Selon le style recherché, il peut être :
- filtré avec du charbon actif afin d’obtenir une robe parfaitement transparente ;
- pasteurisé une ou deux fois pour éviter toute reprise de fermentation (sakés non pasteurisés = namazake) ;
- dilué avec de l’eau pure pour descendre à un degré final entre 12 et 18 % vol.
Certains producteurs choisissent de ne pas filtrer (muroka) ou de ne pas diluer (genshu), ce qui donne des profils plus intenses.

Étape 8 - La maturation et l’embouteillage
Enfin, le saké est stocké à basse température pendant quelques semaines à plusieurs mois. Cette maturation permet de stabiliser les arômes, d’atténuer la perception de l’alcool et de lisser l’attaque en bouche.
Le produit est ensuite embouteillé et peut être conservé de quelques mois à quelques années selon son style. Les sakés non pasteurisés doivent impérativement être conservés au froid.
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