LE GUIDE DES LIQUEURS
ORIGINE
Indifférentes aux effets de mode, de nombreuses liqueurs plus que centenaires se sont maintenues sur le devant de la scène et sont devenues des produits incontournables. Leur force ? Avoir su s’adapter à leur époque tout en conservant leur identité. Parmi les heureux propriétaires de ces alcools « cultes », plusieurs maisons et marques françaises se distinguent : Rocher (1705), Marie-Brizard (1762), Get (1796), Grand Marnier (1827), Combier (1834), Cointreau (1849), Bénédictine (1863).
LES LIQUEURS, UN UNIVERS INFINI ET INTEMPOREL
Malgré leur renommée, toutes doivent faire face à un marché en très forte mutation : nouveaux produits, nouvelles techniques de production, nouvelles tendances, … la concurrence est rude ! Elle a d’ailleurs donné naissance à une nouvelle catégorie de liqueurs : les liqueurs modernes. Mais les liqueurs traditionnelles bénéficient d’un atout considérable, leur histoire, héritage empreint de mysticité, de secrets et de récits épiques au fort pouvoir évocateur.
ENTRE TRADITION ET INNOVATION
Effet de mode ou redécouverte d’anciennes recettes, les liqueurs (traditionnelles ou non) font un retour en force remarqué dans les bars à cocktails et auprès des mixologistes. Au cœur de cette tendance, certaines maisons anciennes, productrices de liqueurs traditionnelles, n’hésitent plus à mettre leur savoir-faire séculaire au service d’autres sociétés, pour produire de nouvelles liqueurs à destination de marchés spécifiques (Hpnotiq - USA). Sont ainsi apparus des parfums et recettes inédits, proposés en réponse aux exigences d’une clientèle plus jeune, plus féminine et plus sophistiquée. Désormais, pour rester compétitives, les maisons font souvent cohabiter en leur sein deux productions à priori antinomiques : les liqueurs authentiques et les liqueurs avant-gardistes.
LE SUCRE EN QUESTION
Qu’elles soient élaborées à base de fruits, de plantes, d’herbes, d’épices, d’écorces, de fruits secs, de fleurs, de racines, de graines ou de fèves, les liqueurs ont toutes en commun de contenir du sucre. À la fois exhausteur de goût, agent conservateur et stabilisant, le sucre joue un rôle déterminant dans le résultat final : il permet de sublimer les arômes, de conserver les fruits rouges souvent fragiles et d’apporter sa texture au produit fini. Sont utilisés le sucre blanc cristallisé, le sirop de glucose (ou bien un mélange de glucose, saccharose et fructose), mais aussi le miel. D’un pays à l’autre, le niveau de sucre autorisé par la loi varie beaucoup. Ainsi, depuis 1908, la réglementation française impose un dosage de 100 g de sucre/litre au minimum. Ce minimum est porté à 250 g/litre pour les crèmes, même si de nombreuses dérogations existent (crème de cassis : 400 g/litre minimum, gentiane : 80 g, liqueur de cerise : 70 g si l’alcool utilisé est une eau-de-vie de cerise).
DÉFINITION
Liqueur : boisson alcoolisée et sucrée, obtenue grâce à différents procédés : macération, infusion et distillation de fruits ou de plantes. Son degré varie de 15 à 55% et, sauf exception, sa teneur en sucre est d'au moins 100 grammes par litre. Crème : liqueur de fruits ayant une teneur en sucre supérieure. Les crèmes doivent titrer au moins 15% et contenir au minimum 250 grammes de sucre par litre. Leur teneur en fruits détermine leur qualité.
LES LIQUEURS, ÉTAPE PAR ÉTAPE
Etape 1 – La base
Le choix de l’alcool : différentes bases d’alcool peuvent être utilisées pour la production des liqueurs. Il peut s’agir d’un alcool neutre, mais aussi de gin, de vodka, de cognac, de whisky ou de brandy. Les matières premières : pour les liqueurs de qualité, les matières premières sont sélectionnées en fonction de leur origine, mais aussi des modes de culture et de récolte. En effet, les agents aromatiques se situent au niveau des graines, des écorces, des pétales, des feuilles, des racines ou de la pulpe des produits sélectionnés. Selon le mode d’extraction choisi, ces extraits seront plus ou moins dominants. Certaines liqueurs contiennent des extraits, des concentrés aromatiques ou des jus de fruits. Les liqueurs de moindre qualité, qui utilisent des essences ou des extraits artificiels, doivent en porter la mention sur l’étiquette.
Etape 2 – Les modes d’extraction
Il existe trois principales méthodes d’extraction des arômes : l’infusion/macération, la percolation et la distillation. L’une ou l’autre de ces méthodes est choisie selon la nature des matières premières et le type d’arôme souhaité. De façon schématique, les arômes de fruits sont généralement extraits à froid, alors que les arômes de fèves, d’écorce, de fleurs et de graines présentent une meilleure extraction à chaud.
L’extraction par infusion et maceration (à froid)
Dans les deux cas, les matières premières sont baignées pendant plusieurs semaines dans de l’eau (infusion) ou dans un alcool (macération). Le but ? En extraire de façon subtile les arômes, mais aussi la couleur naturelle. Afin de respecter les propriétés de chaque composant, il est courant de faire macérer chaque famille de plante séparément. Au terme de l’extraction, le liquide filtré est appelé macération ou infusion. Dans le cas d’une macération, les fruits gorgés d’alcool sont distillés afin d’extraire le maximum de composés aromatiques, puis mélangés aux macérations. L’infusion et la macération peuvent donner lieu à une ultime étape de distillation permettant d’accentuer la fusion entre les arômes et l’alcool. Chaque famille de plante est distillée séparément et donne naissance à un « alcoolat ». Ces alcoolats seront mariés entre eux lors de la phase d’assemblage.
L’extraction par percolation (à froid)
Les herbes et plantes sont placées dans un réceptacle et entrent en contact avec l’alcool sous pression. Petit à petit, l’alcool s’imprègne des arômes et de la couleur des matières premières.
L’extraction par distillation (à chaud)
L’alcool est mélangé avec les fruits, les épices et les plantes, au sein d’un alambic à repasse en cuivre. Le tout est porté à ébullition. Les vapeurs d’arômes s’élèvent et passent à travers une chambre froide pour redevenir liquides. Comme dans toute distillation à repasse, têtes et queues de distillation sont mises de côté. Seul le cœur de chauffe est conservé.
Etape 3 – Assemblage, vieillissement, filtration et mise en bouteille
Une fois préparés, ces alcoolats sont mélangés entre eux selon un ordre et dans des proportions définis par la recette. Le sucre est généralement incorporé en dernier. Cet assemblage peut être « vieilli » sur une période allant de quelques mois à plusieurs années en cuves, fûts ou foudres de chêne. Avant la mise en bouteille, il est ajusté par ajout de sucre, d’eau et d’alcool si nécessaire. Les agents colorants sont incorporés avant l’étape ultime de filtration.
LES PRINCIPAUX STYLES DE LIQUEURS
Au sein du monde des liqueurs on distingue : les liqueurs (de fruits ou de plantes), les crèmes liqueurs qui se démarquent par une très forte concentration de sucre, et les cream liqueurs qui sont élaborées à partir de produits laitiers.
Liqueurs de plantes
Plus anciennes et plus complexes, ces liqueurs sont pour la majorité de tradition monastique à usage thérapeutique. Elles se composent de plusieurs dizaines de plantes et d’épices. Parmi les plus connues : la Chartreuse, l’Amaro, le Kummel et le Jagermeister.
Liqueurs de fruits
Cette catégorie est la plus importante, la plus versatile. Elle oscille entre tradition et modernité. Certaines liqueurs servent de base pour des cocktails, d’autres se dégustent pures. Elles ont pour ambition de restituer au plus juste le goût du fruit à partir duquel elles sont produites : orange et/ou citron (Cointreau, Grand Marnier, Merlet Triple Sec, Dry Curacao Pierre Ferrand, Limoncello), cerises (Guignolet), fruits exotiques (Hpnotiq), melon (Merlet), …
LES CATÉGORIES DE LIQUEURS
Cream Liqueurs :
Bailey’s, Edradour Cream Liqueurs, Arran Gold Cream Liqueur, ... Ces liqueurs à base de crème sont souvent élaborées à partir de whisky. Elles se dégustent pures ou sur glace.
Crèmes Liqueurs & Crèmes de fruits :
Ces liqueurs se distinguent par leur teneur très élevée en sucre, source de leur texture sirupeuse. Ce sont les fameuses crèmes de cassis ou de framboise de chez Merlet.
Liqueurs de café & de chocolat :
Il s’agit principalement d’ingrédients destinés à entrer dans la préparation de cocktails ou de desserts (Fair Café, Chopin Double Chocolate).
Liqueurs de fleur :
Rose, violette, hibiscus, sureau, … Les liqueurs de fleurs sont plus rares et constituent une catégorie à part entière. Servies essentiellement en version cocktail, elles offrent une alternative aux crèmes de fruits pour les champagnes (Quaglia Camomilla, Tempus Fugit Liqueur de Violettes).
Liqueurs d’anis :
Ouzo, Sambuca et Galliano sont autant de liqueurs anisées aux origines différentes.
Liqueurs de fruits secs :
Elaborées à partir d’amandes, de noix et de noisettes, la plus célèbre de ces liqueurs est sans conteste l’Amaretto. Elles complètent bien les liqueurs de café et de chocolat par leurs arômes gourmands.
Liqueurs de whisky :
Ces liqueurs (Glayva, Irish Mist, Drambuie) sont élaborées à partir de whiskies écossais ou irlandais, auxquels sont ajoutés des aromates, des épices, du miel et d’autres ingrédients.
Passées de mode en France en tant que digestifs, les liqueurs traditionnelles sont devenues de véritables sources d’inspiration pour les mixologistes. Quant aux liqueurs modernes, elles offrent de nouvelles opportunités : au moment de l’apéritif sur de la glace, en long drinks ou bien mélangées avec du champagne.